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Ouest-France
Quotidien
Ouest-France du 12/12/1998
Un
groupe de treize lecteurs réagit au projet d'installation d'un
casino à Nantes. Il s'agit de Jean-Pierre Avermaete, journaliste
économique ; Xavier Baglin, gestionnaire Éducation nationale ;
Frédéric Barbe, géographe ; Nicole Cayzelle, institutrice ;
Philippe Coutant, Nantais ; Luc Douillard, président d'association ;
Yves Laventure, employé de banque ; Emmanuelle Lefèvre,
institutrice ; Catherine Ouvrard, institutrice ; Gérard Richard,
citoyen nantais ; Madeleine Riou, informaticienne ; Catherine
Tisserant, étudiante ; Marc Vayer, professeur.
« On apprend ces
jours-ci par Ouest-France que 'Nantes mise sur un casino' [...] Des
machines à sous... est-ce ce que nous souhaitons vraiment pour les
jeunes (et les moins jeunes) de Nantes ? Les casinos, tout le monde
sait bien que cela veut dire : des facilités pour blanchir l'argent
sale du crime et de la corruption ; des connexions plus que malsaines
avec la bulle spéculative mondiale, et les paradis fiscaux ; des
opportunités pour installer la pègre, pardon, le crime organisé,
et les mafias dans une ville de province ».
Au premier rang des
vecteurs du blanchiment
« Ironie de l'histoire : le supplément
'Économie' du journal Le Monde publie ce même jour (4 novembre
1998, annonce d'un projet de casino à Nantes) un compte rendu du
livre alarmant 'Finance criminelle' de Marie-Christine Dupuis
(consultante du Centre de recherche sur les menaces criminelles
contemporaines de l'université de Paris-II). On y lit (entre autres
horreurs sur les paradis fiscaux, la drogue et la prostitution, la
déréglementation économique mondiale), des nouvelles qui
concernent désormais directement les citoyens de cette bonne ville
de Nantes : 'Au premier rang des vecteurs du blanchiment figurent les
banques [...] les bureaux de change et les assurances [...] Mais ce
sont les casinos que préfèrent les mafieux en quête de recyclage,
car ils acceptent l'achat de leurs jetons en liquide et remboursent
ceux-ci avec des chèques'.
« Plus loin, cet article du Monde (par
Alain Faujas) indique comment 'l'argent sale s'investit dans une
série d'entreprises qui manipulent l'argent liquide'. Mais il omet
de suggérer l'opportunité en argent liquide que sont les
billetteries non-numérotées de grandes manifestations sportives et
de spectacles culturels subventionnés, ce qui est remarquable,
surtout lorsque l'on note : la faiblesse actuelle des moyens accordés
à la Chambre régionale des comptes, au procureur de la République
et la police financière, pour la surveillance des institutions
nantaises ; la localisation prévue pour ce futur casino, dans un
quartier hautement culturel en pleine rénovation : 'un hôtel quatre
étoiles et un casino en face de la Cité des congrès'
(Ouest-France); les critères éminemment 'culturels' pour
l'implantation d'un casino : 'Manifestement, Nantes entre dans les
critères d'accueil d'un casino. Outre le centre d'une agglo de plus
de 500 000 habitants, il faut en effet participer pour plus de 40 %
au fonctionnement d'institutions culturelles ' (Ouest-France). D'ores
et déjà, et depuis plusieurs années, plusieurs villes du sud de la
France connaissent des intimidations, des provocations et des
assassinats, que le milieu du crime organisé, souvent proche des
professionnels des casinos, est en mesure de faire subir à la
société civile et aux élus locaux. A ce stade, ce sont évidemment
les bases élémentaires de la vie en démocratie qui sont
compromises durablement ».
Est-ce ce que nous souhaitons importer ?
« Depuis les années 1990, la société française est soumise à un
véritable harcèlement publicitaire et psychologique en faveur des
jeux d'argent. Ce harcèlement est organisé par les professionnels
des jeux d'argent, en particulier la Française des jeux et les
casinos grâce à d'énormes moyens financiers, qui font se coucher
les élus. Ce harcèlement repose sur l'illusion que nous vivons tous
dans une société de gagnants. Il est grand temps de stopper ce
harcèlement organisé en faveur des jeux d'argent au lieu de vouloir
l'étendre par une présence au coeur même de la ville. Question
subsidiaire : comment une municipalité de gauche peut-elle afficher
une telle soumission à l'argent-roi, ses mécomptes et ses
mythologies ?
« Non seulement, les dépenses effectuées dans un
casino sont par nature improductives, mais en outre il faut
considérer qu'elles sont soustraites au budget des ménages alors
qu'elles auraient été sinon dépensées auprès des commerces et
industries locales. Où vont ces recettes des casinos ? : 60 %
environ du produit brut des jeux sont prélevés par l'État,
c'est-à-dire par Bercy à Paris, et quittent donc l'économie
régionale au lieu de l'alimenter. Le solde consenti à la trésorerie
municipale de la commune d'accueil (jusqu'à 15 %) reste très
marginal et ne peut occulter que chaque année des dizaines de
millions de francs s'évaporaient en pures pertes de la sphère de
l'économie nantaise. Réagissons avec toutes les personnes de bonne
volonté, tant qu'il est encore temps ».
Un casino est en projet à
Nantes. Il se situerait en face de la cité des congrès.
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