lundi 21 novembre 2016

« Les premiers pas de Dreyfus libéré eurent lieu à Nantes » (titre et récit reconstitués de mémoire)



Comme on le sait, Alfred Dreyfus est condamné au bagne en 1894 suite à une machination antisémite, appuyée par l'Etat-major, la magistrature, la droite nationaliste et dénoncée par les intellectuels de gauche tels que Clemenceau, Jaurès et Zola suivis bientôt par le mouvement ouvrier. Il s'en suivra une exceptionnelle et très longue crise de régime, qui aura un retentissement international.
 
Lorsque le premier jugement est enfin annulé, Dreyfus est à nouveau jugé, à Rennes en 1899, où contre toute attente, il est à nouveau condamné. Il devra encore attendre pendant des années sa réhabilitation. Mais dix jours après le jugement de Rennes, le président de la République préfère le gracier. Il est enfin libre.

Ses premiers pas en liberté ont-ils eu lieu à Nantes ? Je m'étais posé la question en lisant, dans une compilation d'articles d'époque, qu'il avait peut-être quitté Rennes pour un train à destination du sud, donc vers Nantes.

Je pense que c'était vers le centenaire du procès de Rennes en 1899, donc en 1999.
Pour en savoir plus, j'ai consulté alors une ou deux collections d'archives de journaux nantais. C'est une activité d'historien. Effectivement, on y découvre qu'un reporter nantais de l'an 1899 atteste qu'Alfred Dreyfus, désormais connu mondialement, a été aperçu dans la salle d'attente de la gare de Nantes au lendemain de sa grâce présidentielle. Pour lui Nantes n'est qu'une étape pour rejoindre sa famille dans le sud de la France. 
 
C'est à Nantes que l'officier de police chargé de l'escorter au sortir de la prison de Rennes l'abandonne enfin, et prend, lui, son train pour Paris.

Il n 'est pas donc pas exagéré de conclure que c'est à Nantes que Dreyfus a enfin respiré la liberté effective.

Et j'ai retrouvé également un intervieweur du Figaro qui se glisse à Nantes dans le train d'Alfred Dreyfus, pour lui arracher un premier interview exclusif en liberté, etc.

À la suite de cette petite découverte qui rajoute à la légende dorée de Nantes telle qu'on l'aime, j'ai écrit un article qui a été publié dans le courrier des lecteurs de Ouest-France, sans doute en 1999.

Or bientôt près de vingt ans plus tard, je ne retrouve pas trace d'une coupure de presse. J'avais ce texte dans mes disques durs où ils ont disparu dans les sinistres informatiques divers et variés et l'obsolescence programmée des systèmes.

Et nous manquons de chance, car si ce texte est paru dans Ouest-France, il n'a pas été correctement archivé dans sa base numérique où il reste introuvable, alors que j'y ai retrouvé plusieurs de mes courriers de cette époque.

Dernier manque de chance : cet article ainsi qu'une série de chroniques que j'avais consacrées à l'histoire de Nantes, et parus dans Ouest-France, avait été mis en ligne sur le site de l'association Nantes Est Une Fête, hébergé sur le site associatif Mygale, créé en 1996, fusionné ensuite dans Multimania, avant d'être racheté par Lycos qui supprimera sans prévenir les pages « perso » en 2009.

Mais je ne désespère pas de retrouver la fameuse coupure de presse ! Merci d'avance à ceux ou celles qui l'auraient conservée !

Luc Douillard (21 novembre 2016).

Nos deux illustrations :

La fameuse "Une" de l'Aurore.


Une médaille antisémite célébrant l'ancien ministre de la Guerre Auguste Mercier, ennemi implacable et pervers de Dreyfus, qui ensuite sera élu sénateur pépère de Loire-Inférieure (actuelle Loire-Atlantique) jusqu'en 1920... Bravo l'aveuglement de la droite nantaise ! Cette médaille odieuse date de 1906 à une époque où plus personne de sérieux n'osait contester la réhabilitation de Dreyfus. Ces fous prendront leur revanche en 1940.
Mais n'oublions pas non plus que la mairie de gauche de Chantenay, à l'époque une commune ouvrière indépendante de Nantes, fut la première ville de France à donner le nom de Zola, un nom détesté par les anti-dreyfusards, à une grande place urbaine, terminus des tramways de Nantes, quelques jours seulement après la mort suspecte du grand écrivain défenseur de Dreyfus.