G. Declercq est un exemple pour les mouvements sociaux à venir
De
Luc Douillard, lecteur nantais.
« L'histoire du mouvement ouvrier nantais d'après-guerre reste à faire. On connaît les dates marquantes des grandes grèves dans la métallurgie des années 1950, le déclenchement national de mai 1968 à partir de l'usine de la SNIAS à Bouguenais près de Nantes, l'unité d'action avec la CGT, mais aussi les premières actions communes avec les syndicalistes agricoles qui devaient donner naissance plus tard à la Confédération paysanne d'aujourd'hui.
« On connaît moins le génie militant spécifique de ces animateurs ouvriers de la Basse-Loire, souvent nourris à l'école de la JOC et de l'action catholique ouvrière, sur un vieux fond d'anarcho-syndicalisme nantais.
« Qui dira le volontarisme de ces militants syndicaux, à qui il est arrivé parfois de se mettre en grève de la faim, non pas contre le patronat ou le gouvernement, mais contre leur propre base ouvrière, afin de la réveiller et de la conscientiser ?
« Qui dira l'émulation amicale qui s'était instaurée comme un rite saisonnier entre les Unions locales de Nantes et de Saint-Nazaire, afin que chacune déclenche le mouvement social le plus offensif de l'année ?
« Et qui dira l'humour profond, la gouaille de ces animateurs ? Je me souviens encore de Gilbert Declercq racontant comment il faisait se gondoler une foule de métallos grévistes en bleus de travail, en leur annonçant au micro qu'ils avaient reçu simultanément le soutien de l'évêque de Nantes et du Parti communiste stalinien de l'époque.
« Il racontait aussi comment une autre foule de milliers de métallos avait débordé par surprise la cérémonie de l'inauguration de la foire de Nantes, obligeant le préfet dépité à demander au micro à ses CRS de se retirer sous les quolibets des ouvriers. C'était une époque où il faisait bon vivre en luttant.
« Mais ce syndicalisme de lutte n'était pas que 'mouvementiste', il fut également le fait d'une génération de gestionnaires et de négociateurs avisés qui ont mis en place les institutions sociales issues des conquêtes de la Libération, prévues par le programme du Conseil national de la Résistance : sécurité sociale, santé, retraites (c'est-à-dire l'ensemble des acquis aujourd'hui menacés par le Medef.)
« Gilbert Declercq faisait partie de cette génération qui avait obtenu la déconfessionalisation de la CFTC au sein de la minorité Reconstruction, puis l'évolution de la nouvelle CFDT vers le thème du socialisme autogestionnaire, s'inscrivant à la fois dans une culture libertaire et de refus de tous les totalitarismes.
« À plusieurs reprises, on avait parlé de lui comme un possible premier secrétaire de la confédération. Mais il a toujours préféré les bords de Loire aux fauteuils parisiens.
« Ces dernières années, il ne reconnaissait plus sa CFDT. (...)
« Cette année 2004, nous célébrerons à la fois le 60e anniversaire du programme social de la Résistance et les 40 ans de la CFDT, la vraie, celle de Gilbert et de ses camarades.
« Le mouvement ouvrier nantais peut s'honorer d'avoir compté un animateur tel que lui, qui sera mort sans jamais avoir trahi ses convictions. Il reste un exemple pour les mouvements sociaux à venir et à reconstruire. »
« L'histoire du mouvement ouvrier nantais d'après-guerre reste à faire. On connaît les dates marquantes des grandes grèves dans la métallurgie des années 1950, le déclenchement national de mai 1968 à partir de l'usine de la SNIAS à Bouguenais près de Nantes, l'unité d'action avec la CGT, mais aussi les premières actions communes avec les syndicalistes agricoles qui devaient donner naissance plus tard à la Confédération paysanne d'aujourd'hui.
« On connaît moins le génie militant spécifique de ces animateurs ouvriers de la Basse-Loire, souvent nourris à l'école de la JOC et de l'action catholique ouvrière, sur un vieux fond d'anarcho-syndicalisme nantais.
« Qui dira le volontarisme de ces militants syndicaux, à qui il est arrivé parfois de se mettre en grève de la faim, non pas contre le patronat ou le gouvernement, mais contre leur propre base ouvrière, afin de la réveiller et de la conscientiser ?
« Qui dira l'émulation amicale qui s'était instaurée comme un rite saisonnier entre les Unions locales de Nantes et de Saint-Nazaire, afin que chacune déclenche le mouvement social le plus offensif de l'année ?
« Et qui dira l'humour profond, la gouaille de ces animateurs ? Je me souviens encore de Gilbert Declercq racontant comment il faisait se gondoler une foule de métallos grévistes en bleus de travail, en leur annonçant au micro qu'ils avaient reçu simultanément le soutien de l'évêque de Nantes et du Parti communiste stalinien de l'époque.
« Il racontait aussi comment une autre foule de milliers de métallos avait débordé par surprise la cérémonie de l'inauguration de la foire de Nantes, obligeant le préfet dépité à demander au micro à ses CRS de se retirer sous les quolibets des ouvriers. C'était une époque où il faisait bon vivre en luttant.
« Mais ce syndicalisme de lutte n'était pas que 'mouvementiste', il fut également le fait d'une génération de gestionnaires et de négociateurs avisés qui ont mis en place les institutions sociales issues des conquêtes de la Libération, prévues par le programme du Conseil national de la Résistance : sécurité sociale, santé, retraites (c'est-à-dire l'ensemble des acquis aujourd'hui menacés par le Medef.)
« Gilbert Declercq faisait partie de cette génération qui avait obtenu la déconfessionalisation de la CFTC au sein de la minorité Reconstruction, puis l'évolution de la nouvelle CFDT vers le thème du socialisme autogestionnaire, s'inscrivant à la fois dans une culture libertaire et de refus de tous les totalitarismes.
« À plusieurs reprises, on avait parlé de lui comme un possible premier secrétaire de la confédération. Mais il a toujours préféré les bords de Loire aux fauteuils parisiens.
« Ces dernières années, il ne reconnaissait plus sa CFDT. (...)
« Cette année 2004, nous célébrerons à la fois le 60e anniversaire du programme social de la Résistance et les 40 ans de la CFDT, la vraie, celle de Gilbert et de ses camarades.
« Le mouvement ouvrier nantais peut s'honorer d'avoir compté un animateur tel que lui, qui sera mort sans jamais avoir trahi ses convictions. Il reste un exemple pour les mouvements sociaux à venir et à reconstruire. »